Le retable de l’Assomption de Beaulieu-en-Argonne (55)
Seul vestige de l’église de Beaulieu, le retable, construit au XVIIe siècle, est classé aux monuments historiques par arrêté du 19 juin 1972.
Petite promenade dans l’enclos de l’ermitage Saint Rouin, dans une cathédrale de verdure, sur les traces de Saint Rouin ou Saint Rodingue, fondateur de l’abbaye de Beaulieu-en-Argonne.
D’après « Histoire ecclésiastique de la province de Trèves et des pays limitrophes » – Louis Clouet – 1844
La forêt d’Argonne, entamée du côté du Dormois par les disciples de Balderic, voyait en même temps ses ombrages séculaires éclaircis, à quelque distance de là vers le sud, par un autre pieux défricheur, Rodingue, connu chez nous sous le nom populaire de saint Rouin. Il résulte des traditions recueillies au XIe siècle par l’abbé de St.-Vanne Richard, que Rouin venu d’Ecosse ou d’Irlande, avec St.-Wendel, habita d’abord Tholey et gouverna ce monastère quelque temps après que saint Paul l’eut quitté pour le siège épiscopal de Verdun.
Vers l’an 640, cet évêque engagea son ancien ami à venir fonder un monastère sur le territoire Verdunois ; et saint Rouin, déférant à cette invitation, choisit pour l’exécution de ce pieux projet un endroit nommé alors Wasleu (vaslus lucus) ou Wasloge, au centre de la grande forêt Argonnaise. On croit que Wasloge est aujourd’hui le hameau de Waly.
La malice des hommes vint poursuivre le solitaire jus qu’en cette sauvage retraite. Austrèse, seigneur d’Autrécourt (Austresii curtis), village qui porte encore le nom de son ancien maître, trouva mauvais qu’on défrichât les bois. Il chassa le saint homme, après l’avoir fait fouetter, ainsi que les disciples encore peu nombreux qui le suivaient. Mais le ciel irrité punit cet attentat ; Austrèse, frappé de la main de Dieu, tomba, avec sa famille, en de très dangereuses maladies, pendant que St.-Rouin qui s’était enfui en pèlerinage jusqu’à Rome, priait au tombeau des Apôtres. Un jour, il crut y ouïr saint Pierre, disant du fond de son sépulcre : Retourne en ton désert : tu as été battu de verges ; mais le Christ ne l’a-t-il pas été plus que toi dans sa douloureuse Passion !
Ce miracle décida le retour de l’anachorète : il revint, guérit Austrèse, reçut de lui la terre de Wasloge et le vit travailler de ses propres mains au monastère que l’on y bâtit. Saint Rouin, ayant affermi cet établissement, se retira seul et presque centenaire dans un ermitage voisin qui porte encore son nom : il y mourut au commencement du VIIIe siècle. Son corps, reporté dans l’abbaye, puis enlevé de force en 1297 par Henri III comte de Bar, fut honoré jusqu’à la Révolution dans la collégiale St.-Maxe de cette ville.
Le monastère de Wasloge fut, dès son origine, dédié à saint Maurice, c’est-à-dire mis sous la règle d’Agaune. Il prit le nom de Beaulieu vers l’an mil, appartint aux bénédictins en leur congrégation de Cluni, puis en celle de St.-Vanne, à dater de 1610, et finit en 1790 avec une réputation de sainteté des plus médiocres. Il n’y avait rien d’ancien ni dans ses archives, trois fois brûlées, ni dans ses bâtiments que l’on reconstruisait à la moderne, au moment de la Révolution, et qui ont aujourd’hui totalement disparu.
Dix-huit villages doivent leur naissance aux défrichements opérés par les moines de Beaulieu, dont le domaine seigneurial, ayant titre de comté, s’étendait sur une surface de douze lieues, et composait un bailliage ressortissant à Châlons et de là au parlement de Paris. Ce furent ces moines qui, vexés et pillés outre mesure par les comtes de Bar, appelèrent les premiers le roi de France sur les frontières du Saint-Empire et donnèrent lieu à la guerre qui se termina par le fameux traité de 1301, où le comte Henri III fut contraint de reconnaître la suzeraineté de Philippe-le-Bel sur toute la partie du Barrois située à l’occident de la Meuse. D’après les dispositions de saint Rouin lui-même, Beaulieu et toutes ses dépendances relevaient de l’église de Verdun.