La chapelle de Libdeau (54)
Propriété privée, inscrite partiellement aux monuments historiques en février 1995, l’ancienne commanderie des templiers (enfin ce qu’il en reste) se meurt.
Encore des vestiges de l’histoire de la Lorraine qui disparaîssent !
Deux fervents défenseurs du patrimoine lorrain avaient lancé un appel au secours : Monsieur Antony Koenig en mars 2010, puis monsieur Olivier Petit en octobre 2010.
De nouvelles photographies ont été publiées en avril 2011 et l’on voit qu’une grosse partie de la toiture s’est effondrée.
Depuis mai 2011, les choses semblent vouloir bouger. Plusieurs personnes sont émues de voir ce monument se dégrader de la sorte et certaines sont même prêtes à apporter leur savoir-faire (d’après les commentaires publiés sur les deux blogs).
Alors mobilisons-nous pour que la chapelle reste debout !
Je ne peux malheureusement à mon niveau, que relayer l’appel au secours, vous proposer une synthèse de deux articles écrits au XIXe siècle, et surtout croiser les doigts, pour que la mobilisation aboutisse à la sauvegarde de ce qui reste de la commanderie …
Les photos sont extraites des blogs de messieurs Koenig et Petit.
Un blog, où toutes les nouvelles concernant la sauvegarde de cette chapelle, a été créé par monsieur Bertrand Siffert. Vous pouvez suivre l’évolution des recherches et des événements ici.
D’après un article paru dans les « Mémoires de la société d’archéologie lorraine » – Année 1870
et un article paru dans « L’annuaire administratif, historique, judiciaire et commercial de la Meurthe » – Année 1852
Libdeau, aujourd’hui simple cense, située à cinq kilomètres de Toul, près de la route de Pont-à-Mousson, existait déjà en 982. Au XIIe siècle, c’était une maison de Templiers qui passa ensuite, au XIVe siècle, lors de la suppression de cet ordre célèbre, aux Hospitaliers.
Le premier commandeur de cette maison, pour l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, fut frère Bertrand de Burei, qui mourut en 1326, le vendredi après la saint Gengoult. Sa tombe se voyait autrefois dans le sanctuaire de la chapelle de Libdeau. Dans le courant de l’année 1329, l’évêque de Toul, Amédée de Genève, leur fit don de cinquante jours de terre. Ceux-ci en firent alors une commanderie de Malte. Libdeau eut beaucoup à souffrir en 1342 des courses des gens du duc de Bar et de plusieurs autres seigneurs (parmi lesquels Jean de Marly et Brun de Rosières), ainsi que pendant la guerre de Trente-Ans, époque à laquelle les bâtiments de ferme furent incendiés.
La plupart des constructions actuelles datent du XVIIe siècle. Un pied-terrier déposé aux archives de la Meurthe, dressé en 1656, donne le détail des bâtiments de cette commanderie et de ses dépendances.
Voici de quoi se composaient les maisons et héritages de la commanderie de Libdo, et l’état dans lequel ils se trouvaient :
« L’église ou chapelle Saint-Jean, belle et spacieuse, en très bon état de murailles, couverture et toiture, l’autel en son entier, n’y ayant rien qui manque que quelques vitres et portes ruinées par la désolation de la guerre.
Un petit corps-de-logis entier de murailles et toitures, rétablies, aussi bien que la couverture de ladite église, aux frais du sieur commandeur de Rennepont, dans lequel bâtiment demeurent deux feriers….
Deux granges vis-à-vis de ladite église, séparées d’icelle, aussi en leur entier, et réparées et entretenues aux frais dudit sieur de Rennepont, er tout le reste des maisons et bâtiments qui étaient au-devand et ez environs de ladite église ayant été brûlé et ruiné dès l’année 1636, pendant le fort de la guerre…
Toutes lesquelles maisons, avec les terres, prés et bois en dépendant, appartiennent à ladite commanderie en toutes sortes de haute justice, moyenne et basse, sans part d’autrui… ».
On y trouve encore un autre plan comprenant la chapelle et les bâtiments, dressé en 1754. La chapelle et les bâtiments de Libdeau, furent réparés dans la suite. Le commandeur Louis-Robert de Bermondes fit réédifier, en 1762, les maisons qui sont indiquées dans le pied terrier de 1656, comme ayant élé brûlées et ruinées pendant les guerres. Une maison de garde et une écurie furent construites, du coté du nord, contre la chapelle, où se célébrait la messe les jours de dimanches et de fêtes.
La commanderie fut vendue à la Révolution le 6 Thermidor de l’An II, comme propriété nationale pour la somme de 255 000 livres.
L’oratoire devint un magasin à fourrages. Néanmoins, il été conservé jusqu’aujourd’hui dans ses parties essentielles.
C’est un édifice de l’époque ogivale primitive, d’une architecture svelte. Il est orienté, élevé sur un plan rectangulaire, présentant, dans œuvre, 18m30 de longueur et 8m60 de largeur. On n’y compte que trois travées, une pour le chœur, deux pour la nef. Les nervures sont à boudins, et les baies ogivales en lancettes sont étroites et élancées. La porte d’entrée, dans son tympan, est ornée d’un groupe en bas-relief, représentant la Vierge encensée par deux anges. A l’extérieur, le monument est terminé, à l’orient et à l’occident, par deux pignons gablés.
Dans les combles, il existe une ancienne petite cloche portant cette inscription en lettres gothiques Ave Maria gratia plœna. Le pavé, en partie au moins, est formé de dalles tumulaires, dont quelques-unes sont du XVe siècle, et des chevaliers de Malte. L’épitaphe de l’une d’elles commence ainsi Ci git Don José Jérôme de Sheridan.
Autrefois, on y voyait aussi celle de Bertrand de Burey (+ 1326), premier commandeur de Libdeau.
Vers 1836, dans des fouilles près de la chapelle, on découvrit le squelette d’un chevalier armé de toutes pièces, et l’armure fut offerte à M. le baron de Vincent, alors sous-préfet de Toul. Depuis cette époque, d’autres sépultures ont été découvertes encore avec des débris d’armes.
C’est près de là que se sont livrées, au moyen-âge, deux batailles importantes :
- la première, en 612, entre Théodoric II, roi de Bourgogne, et Théodebert II, son frère, roi d’Austrasie, dans la plaine de Champagne, située entre Libdeau et Toul
- la seconde, au Xe siècle, gagnée par Charles-le-Simple, sur les Allemands, en un lieu appelé encore le Champ-des-Allemands, près de la route, aux confins des territoires de Toul et de Francheville.
On a retrouvé, il y a quelque temps, des armes du moyen âge dans ce dernier canton.