Comment naquit l’amanite
D’après « Légendes et contes lorrains d’autrefois »
Il y a bien longtemps, au cœur d’une forêt profonde de Lorraine, s’élevait un magnifique château. La châtelaine était une dame d’une merveilleuse beauté et elle vivait dans une grande richesse, servie par une nombreuse domesticité.
Tout le monde ignorait qu’elle était fée. En tant que telle, elle ne pouvait, à son grand regret, prendre mari. Elle en conçut une jalousie féroce à l’égard de ses sœurs humaines et une horrible vengeance fermenta dans son cœur.
Lorsqu’un chevalier égaré dans les bois touffus se présentait au château pour y quêter l’hospitalité, elle le recevait avec tous les honneurs dus à son rang. Elle lui offrait un somptueux banquet. Des mets délicieux et rares circulaient dans de la vaisselle d’or et les vins les plus capiteux resplendissaient comme des ribis dans des coupes de cristal de roche.
A la fin du repas, alors que le chevalier, ébloui par tant de luxe et de beauté, se précipitait aux genoux de la dame, elle lui présentait une dernière coupe dans laquelle elle avait versé un poison violent, fruit de sa machiavélique industrie.
Alors, avec un sinistre éclat de rire, la belle laissait le chevalier expirer à ses pieds dans d’atroces souffrances.
Un jour, le fils du roi se présenta au château. Il y subit le funeste sort de ses infortunés prédécesseurs.
Cette affaire s’ébruita et parvint aux oreilles de la reine des fées. Celle-ci se fâcha tout rouge et, pour punir la criminelle, la métamorphosa, d’un coup de baguette magique, en champignon.
Et ce champignon continue à distiller le poison implacable inventé par la cruelle fée. Voilà pourquoi, à l’ombre des grands bois, vivent les belles et sinistres amanites phalloïdes.