Nous avions quitté l’histoire du petit village de Lion-devant-Dun, au moment où Gauthier de Mérowald, mort, paraît-il, sans postérité, disparaît pour faire place à Henry de Mérowald.
Je vous propose de poursuivre l’aventure… Les appellations anciennes ont été respectées.
D’après le « Manuel de la Meuse » de Jean François Louis Jeantin – 1861
Henry de Mérowald, petit-fils de Philippe de Louppy
Ce personnage a joué un rôle si important dans les événements politiques du règne de Thiébault Ier de Bar, tant sur les barrisiens que sur les luxembourgeois, qu’il est indispensable d’en indiquer ici les causes et d’en montrer les résultats.
L’histoire de Louppy et celle de Lions sont liées, par leurs premiers seigneurs, à l’un des grands événements politiques de la fin du XIIe siècle : la réunion du Barrois et du Luxembourg, sous les lois d’un prince barrisien, Thiébault Ier de Stenay.
L’on a vu qu’en 1189, était arrêté le mariage de Thiébault de Stenay avec la jeune Ermesinde, âgée de 4 ans à peine. Et c’est alors que nous voyons apparaître le premier seigneur connu de Louppy et ses fils.
La charte anténuptiale constate que Thiébault, comme maître du Briacensis, a assigné à sa fiancée le château de Briey et toutes ses dépendances, avec moitié de leurs futurs acquêts. Les témoins de cet acte sont : Baudouin de Bar – Guillaume de Longwy – Gérard d’Othange, sire de Haute rive – Ulric de Florhanges, sire de Billy et d’Argentel – Lieutard de Briey, sire de Jametz – Wery de Walcourt, sire de la Fentsh (Fontois) – Philippe de Louppy, sire de Bazeilles – Hugues Beles de Triangulo.
Philippe de Louppy, parent de Gérard d’Othange, maison Clarambault de Hauterive, près d’Andenne, Philippe était, paraît il, un de ces cadets namurois, qui avait suivi Godefroid de Namur, lorsque, par son mariage avec Ermenson Ière, héritière du Luxembourg, en 1136, il avait réuni les deux comtés sur sa tête.
A la suite des Walcourt alliés à la maison de Chiny, les Clarambault d’Hauterive s’étaient établis, en franc-fiefs, sur les versants de Metz, et ils se trouvaient coindivisionnaires dans les terres novales des bassins de l’Othain, de la Tinthe, et du Loison.
On trouve tous ces Namurois, à la suite des comtes de Chiny, Louis III et Albert, réunis autour de l’évêque Adalbéron de Verdun, quand il s’agit d’établir et de doter l’abbaye de Châtillon. Alors, Philippe est sire de Bazeilles (Charte de 1163).
Quelques années après, on le trouve sire de Louppy. C’est dans la charte de 1173-1181, sous l’épiscopat d’Arnoux de Chiny, que, pour la première fois, Philippe prend cette qualification.
Ce personnage est assisté : de Gobert d’Apremont, sire de Dun, gendre du comte Louis III de Chiny – Gilbert de Werysse, sire de Cons avec Gilon de Cons - Hugues et Thiéry de Mucey – Rambauld de Chauvancy et de Gemmas - Ponce de Failly.
A tous les actes de cette entreprise, (réunion Bar – Luxembourg), en tête des plus braves, avaient figuré Philippe de Louppy, fils de Clarambauld de Xorbey, dit Alta Ripa dans la charte de 1217, par laquelle il reçut, plus tard, Habay, terre de Saint Hubert, sur la haute Semois, des mains de Waleram d’Arlon.
Et, sous Philippe, avaient milité ses fils Frédéric de Vernonbour, Arnould de Louppy, Simon de Murault, Denier de Sassey, et les petits-fils de Philippe, c’est-à-dire, Nicolas d’Othanges, sire de Hans les Marville et de Bazeilles, issu de Frédéric, et Henry de Mérowald, avec Gérard d’Haraucourt, issus d’Arnoux de Louppy.
Tous étaient l’âme ou la main du comte Thiébault. Nos quatre grand-chevaux de Lorraine ont gagné leurs éperons à cette époque-là.
Or, comme châtelain de Laferté, Henry de Mérowald était avoué des moines de Saint Hubert, pour leur prieuré de Chauvancy. Par les événements de la guerre, il s’empara de l’avouerie de Mirouart qui, pendant tout un siècle, resta dans les mains des seigneurs de Mérowald et de Lions.
Après la paix de 1199, Henry de Mérowald revint dans le Walon et dans les basses Wabvres. Là, il partageait l’avouerie de Juvigny avec son père et son frère Gérard de Remoiville, sire d’Haraucourt. Il était le fléau des vassaux de la sainte maison, comme il l’était de ceux de Saint Hubert. La charte de petit Verneuil, malheureuse commune (1204), est là pour le démontrer.
A la mort d’Ermesinde, en 1246, et alors que des démêlés sanglants s’élevèrent entre son beau-fils Henry II de Bar, et son fils (du second lit) Henry II de Luxembourg, pour la possession de Marville et de Louppy, Henry de Mérowald suivit le parti du comte barisien.
L’âge n’avait pas adouci ses mœurs féroces, et toutes ses convoitises rapaces tendaient au dépouillement des moniales de Juvigny.
A Jametz, était une chapelle dite de Sainte Marie du Mont. Aulmonée, depuis plusieurs siècles, par un archidiacre de Trêves, Rodolphe, à l’autel de Sainte Scholastique, elle était assez largement dotée. Ce vieil oratoire était la mère-église de la bourgade de Jametz.
Soutenu par son père, Arnould de Louppy, sire du Mont Saint Martin, secondé par son frère Gérard d’Haraucourt, sire de Remoiville, Henry de Mérowald s’était ensaisinné des dixmes de cette église. Après arbitrage de son ancien compagnon d’armes Henry de Houffalise, alors homme de fief de la châtellenie de Marville, et du prieur de Saint Nicolas, doyen de la chrétienté, il ne fallut pas moins que la haute autorité du comte Thibault II de Bar pour l’en faire déguerpir.
Ce turbulent seigneur avait eu un fils et deux filles. Le fils, Thiéry de Mirouart, en Ardenne, mourut sans enfants, en 1288. Isabelle, sa sœur aînée, avait épousé Jacob de Cons. Elle apporta ce château dans les mains de son mari, avec les hommages et tout ce qui était tenu, à ce titre, de la pairie de Bouillon. Marie, la plus jeune, fut mariée à Godefroid de Beaufort, seigneur de Perwez.
Alors Mérowald et Lions passèrent à Jehan de Louppy, dont il faut dire un mot.
Jehan de Louppy, sire de Merowald et de Mirebeau
Jehan de Louppy était fils de Nicolas, sire de Hans et Bazeilles (Charte de 1287). En 1285, Jehan de Merowald assiste aux tournois, donnés par Louis V de Chiny, dans sa cour plénière, à Chauvancy le château.
En 1288, Jehan de Louppy recueille les fiefs masculins de son cousin Thiéry de Mirouart. Avec Geoffrois III de Dun, son suzerain médiat, avec Gérard de Louppy son oncle, avec la plupart des autres fiefés des basses Wabvres, il concourt aux délibérations internationales pour le règlement des limites germaniques et françaises, au sujet de la mouvance des abbayes de Montfaucon et de Beaulieu en Argonne, terres que le roi Philippe de France revendiquait à l’encontre du comte de Bar Thibault II.
Les barons qui attestèrent en cette circonstance, furent : Simon, sire de Commercy – Geoffrois III de Dun, sire d’Aspremont – Henri, sire de Blâmont – Thomas, princier de Verdun - Philippe, châtelain de Bar - Jean, sire de Cons, gendre d’Henry de Mirouart - Philippe et Endes, seigneurs de Sorcy – Gérard d’Haraucourt, sire de Louppy.
On a vu les motifs qui ont entraîné partie des barons des basses Wabvres à se mouvoir, au temps du roi Jehan de Bohême, dans l’orbite du Luxembourg. A la suite du traité de 1318, entre ce monarque d’une part, Henry d’Apremont, évêque de Verdun, et Gobert V de Dun d’autre part, Jehan de Louppy-Mirowauld fut de ce nombre. Aussi, par sa charte du 13 mars 1326, le roi-comte de Luxembourg donne à noble homme, son cher et féal Jehan, seigneur de Mirabel et de Marach, chevalier, et à ses hoirs, en fief, hommage, justice, et juridiction, la ville de Maresh et dépendances, c’est-à-dire Mersch, dans le pays de Luxembourg.
Alors cette branche de Louppy disparaît des basses Wabvres et Mirowald passe aux du Castelet.
Les barons du Castelet de Lions, sous le Barrois mouvant.
Renauld de Lions et Colart de Chaumont
La querelle d’Henry III avec la France, amena l’abandon de l’indépendance ancienne des suzerains du Barrois.
La défaite de Barrisiens à l’affaire de Frouard en novembre 1309 – leur échauffourée à l’affaire de Ligny, en mars 1368 – la ruine de la maison de Dun-Apremont, en 1377 - et plus tard, la défaite lorraine à Bultgnéville, en 1431, défaite si glorieusement réparée, en 1477, par la déconfiture bourguignonne à l’étang Saint Jean …
Ces quatre sinistres causèrent : le désastre du baronnage des basses Wabvres - l’extinction de plusieurs de ses anciennes familles - la transplantation d’un certain nombre d’autres sous les Vosges et l’établissement de quelques cadets près de la capitale du Barrois.
De ce nombre furent les du Castelet-Tricaschaux, et la branche puînée des anciens Loupeïns.
Affaire de Frouard – 1309
Edouard Ier, de 1302 à 1337, n’eut pas un règne plus paisible que celui de son père : engagé dans les différends de son grand-oncle Renaud, évêque de Metz, avec Thiébault II, duc de Lorraine, il subit un échec, le 6 novembre 1309, devant Frouard. Et pendant que ses troupes périssaient dans la Moselle, le jeune prince et son entourage tombaient aux mains de l’ennemi. Ils y restèrent captifs jusqu’en 1314.
Cette affaire fut la première cause de la décadence du baronnage de Louppy. Son chef Raoul, avec Jean de Deuilly du Chaufour, son allié, furent repoussés de toute rançon. Quant au comte de Bar, heureux fut-il d’être admis à payer 90 000 livres, pour sa liberté personnelle, et pour celle de ses autres chevaliers.
C’est alors qu’en 1326, Jehan de Mirowauld s’établit dans le Luxembourg, et que Renaud du Castelet, époux de Jeanne du Chaufour, aliéna sa portion de Lions à Colart de Chaumont, en Porceanais, auteur des du Saulcy de Jametz.
Ce démembrement de la baronnie de Mirowald reçut la sanction de Gobert VI de Dun-Apremont, époux de Marie de Bar, sœur du fameux brigand Pierre de Pierrefort, alors que les bandes d’incendiaires mettaient à feu et à sang le Verdunois, les Woepvres, et le pays Messin.
Les destinées de Lions, sous Colart de Chaumont, sous le duc Robert, sous les derniers princes de Bar, et, plus tard, sous les princes de Sedan, sont les mêmes que celles de Dun et Jametz.
Que devinrent-elles sous la Lorraine réunie au Barrois ?
L’inféodation des terrages de Lions
Affaire de Ligny – 1368
Le guet-apent de Ligny avait été funeste à ses auteurs. C’étaient, malheureusement, les Barrisiens piteusement tombés dans l’embuscade, pris eux-mêmes au piège qu’ils avaient tendus aux Messins.
Voici quels en furent les résultats :
Leur duc Robert, désarçonné, obligé de se rendre, sur les corps sanglants d’une vingtaine de ses gens immolés – le jeune comte de Salm (seigneur propriétaire de Brandeville, et d’une partie de Louppy, de Juvigny et de Remoiville), étendu sans vie près du corps du sire d’Antipray, de celui de Bultgnéville, et de ceux de Jean de Sorbey et de Jehan de la Tour devant Virton.
Soixante chevaliers, tous de haut parage, faits prisonniers avec leur prince, dont, entre autres : Robert des Armoises, de Delut - Perin d’Avoncourt, de Deuilly - Willaume de Beaurepaire - Hue de Billy - Geoffrois de Saint Baulsey, de Laferté - Thiéry de Bellefontaine - Gérard de Buxay - Gilles de Bour, ou de la Fontaine - Willaime de Bellonfort - Jehan de Chardogne, cadet de Louppy - Jean de Chastelet, de Lions - Simonin de Creuve - Ferry de Dun - Jacques d’Espinal, de Cons - Jehan Henriquet de Staules - Jacomet de Laferté, sire de Louppy - Wary de Fléville-Cornay - Durandart de la Grange - Lambelet d’Yvoi - Jean de Mars la Tour - Pierre de Moncel - Henry de Magnienville - Godmann de Marley - Gérard de Mercy – Perceval de Nettancourt - les deux Henry de Rochefort - Louis de Sancy - Ferry de Ville-ez-mont (Ville-aus-berg) - Jean et Collignon de Villers - Husson de la Val, de Bazeilles - Godefroid de Wyse, etc.
Quarante chevaliers, échappés du guêpier, par l’entrain de leurs bons ronsins de bataille, dont : José d’Apremont - Pierson d’Amelle - Henry de Boulanges - Jean de Clermont - Vellin de Chaumont - Henry de Creuve - Gilquin de Goméry, sire de Sompthonne - Finck de Housse et son suivant Jeantin l’archer - Jehan de Hadonchatel - Bastin de Sorbey, sire de Louppy - Thirion du Saulcey - Baudouin de la Tour - Erard et Jehan de Watronville pour ne citer que les plus rapprochés des basses Wabvres et du Walon.
On voit, par cette liste, quelle atteinte profonde cette échauffourée, motivée d’abord sur un simple duel, porta à la noblesse chino-barrisienne…
On comprend quelles plaies de bourse durent s’élargir, dans tant de familles, qui ne vivaient que d’extorsions sur leurs pauvres serfs, ou de courses sur les terres de l’église et de leurs voisins.Le trésor public et les ressources particulières étaient donc épuisés, depuis un siècle, quand l’affaire de Bultgnéville envoya René II captif dans la tour dite de Bar, au château de Dijon, en 1431. De là, l’échange forcé de Jametz contre Cassel.
De là, les premières inféodations lorraines des terrages de Lions.
Après la fusion des d’Orey -Mouzay dans la famille des Lardenois de Ville et Dohan, plusieurs branches féminines des de Mouzay restèrent nanties de portions des domaines de leurs ancêtres, à savoir : d’Inor et Pouilly… à Lions et Murvaux.
Ce furent notamment : les Bertignon-Mouzay – les d’Escamelle de Lions – les Bathailly-Saint Vincent de Murvaux. (Lettres patentes du duc Charles III de Lorraine, du premier mars 1691, après la prise de Jametz.) Le manoir seigneurial de Lions fut attribué, en 1633, aux d’Escamelle, qui eurent le Pavillon et ses dépendances, et aux de Saint Vincent, qui eurent les bâtiments accessoires. Les deux censes-fièfes furent partagées entre eux.
Gilles d’Escamelle, écuyer, seigneur de Berlise, Belmar, Quincy, Pouilly et Inor, époux de Marie Marguerite d’Escamelle. Cette famille disparaît de Lions dans le cours du XVIIIe siècle, par la mort du mari et de la femme, inhumés dans l’église, en 1731 et 1732.
Jean de Gentils (n° 1), chevalier seigneur de Tailly, Viviers, Artaize, Smuid, et Jean de Gentils (n° 2), seigneur des dixmes inféodées de Montigny et de Doulcom, en partie, avaient épousé, successivement, Marie Anne de Vion, dame, en partie, des terrages des Lions. De ces unions étaient nés : Louis – Jean, mort en bas âge – Nicolas, mort en bas-âge et François.
Louis de Gentils, chevalier, seigneur de Viviers, Artaize et Smuid, avait épousé Jeanne Magdelaine de Mecquenem de Mezaudel, et mourut, à Lions, le 20 janvier 1763. De ce mariage naquirent : Charles – Jean François – Simon – Charles Gaspard François – Marie Magdelaine Marguerite et Louis François.
Marie Magdelaine de Gentils, ci-dessus, devint femme de Jean Baptiste Aimé de Failly, seigneur de Villemontry. Puis les de Gentils disparaissent de Lions pour y faire place à la famille de Saint-Cyr et de Saint Pierre d’Honnoré du Luxembourg. En 1769, Joseph Léonard, chevalier de Saint Cyr, officier au régiment de Penthièvre, et sa femme Thérèse de Saint Pierre, habitaient au château de Lions.