Jametz aux XVe et XVIe siècles

Blason de Jametz

 

Je vous propose de continuer l’histoire de Jametz, et vous pourrez voir qu’elle est intimement liée à celle de l’ensemble du duché de Lorraine, du duché de Bar, du duché de Luxembourg, et même à celle de la France.

En effet, Jametz a été au centre de la guerre de la Ligue (union des catholiques formée en France à la fin du XVIe siècle pour combattre le protestantisme, et qui fut amenée à faire la guerre aux rois Henri III et Henri IV) pendant presque deux ans.

Les appellations anciennes ont été respectées.

D’après le « Manuel de la Meuse » de Jean-François-Louis Jeantin – 1861

Echange de Jametz contre Cassel

- Pendant que René d’Anjou gémissait dans la prison de Dijon, où l’avait conduit la défaite de Bultegnéville (1431) …
-
Pendant que Philippe le bon imposait à son captif la cession des droits du Barrois sur Cassel en Flandres, contre la cession des droits du Luxembourg sur Jametz …
-
Pendant que le prince lorrain négociait l’échange des droits de Jeanne de Marle, sa coindivisionnaire à Cassel, contre l’abandon de sa propre part indivise à Jametz…
-
Pendant l’intervalle du traité provisoire de 1432 au traité définitif du 25 mars 1437…
-
Pendant, enfin, la purge de l’engagère de René, quant à l’une et quant à l’autre de ces deux terres, c’est-à-dire jusqu’en 1449,
1a possession de Jametz était restée incertaine, précaire, disputée, litigieuse, entre les arrières vassaux du Luxembourg et ceux de la Lorraine (accusations de violation de la foi féodale dirigées contre les Lamarck, et celles dirigées contre Godefroid de Jametz, par rapport aux évêques de Verdun).

D’un côté, celui du Luxembourg, voilà les du Hatois…

Jean du Hautoy était fils de Jacquemin de Beaumont, sire de Viller devant Orval, de Létanne, et seigneur du châtelet du Hatoi sous Margny, et de Lise de Samoigneux. Jean du Hautoy épousa Jeanne comtesse d’Hennemont et de Jeandelaincourt, en 1474. Il mourut en 1528.

De par son père, alors proscrit par la France, Jean était habile à se dire seigneur de Jametz, en partie, comme il le fut plus tard de Vaudoncourt, de Recicourt et de Gouraincourt. Les droits de ce mineur étaient maintenus par les officiers de Bourgogne, au gouvernement de Montmédy, et par Jean, dit le Bath, son oncle, que René II avait nommé gouverneur de Jametz en 1479, fonctions, purement nominales, et que le Bath ne put exercer.

De l’autre côté, celui des Barro-Lorrains… voici les de Marley…

Collart de Marley, sire de Dun, en partie, de Salcey et de Florenges. Ce chevalier était chambellan du roi de Sicile, et en 1428, il se reconnaissait feudataire d’Elisabeth de Gorlitz, princesse de Luxembourg, pour ce qu’il possédait en la ville et sur le ban de Jametz.

Cette vassalité n’était point éteinte, alors, par l’échange de 1437. Elle ne l’était pas même quand il mourut en 1446, car elle ne s’effaça que par l’accomplissement complet du traité. Voilà pourquoi, en 1448, les droits d’Ide du Châtelet, sa veuve douairière, étaient encore contestés.

Cette phase obscure de l’histoire de Jametz exige une attention, toute particulière, sur les transformations de noms des personnages, alors groupés à cet angle avancé de la Champagne, entre les deux Barrois (mouvant et non mouvant).

Voici les principaux acteurs, en 1415, après la funeste bataille d’Azincourt.

Le roi Jean de Bohême était tombé sur le champ de bataille de Crécy en 1346. Son fils Wenceslas, né de Béatrix de Bourbon, dame de Damvillers, lui avait succédé. Et Wenceslas était mort sans enfants, en 1383, laissant la succession, au duché de Luxembourg, ouverte aux luttes de divers prétendants. C’est la Bourgogne qui l’avait emporté.

Azincourt venait d’ouvrir celle du Barrois au cardinal de Bar, et à son neveu, le roi René d’Anjou.

Edouard III de Bar, en mourant célibataire, en 1415, avait laissé ses domaines aux autres enfants du duc Robert et de Marie de France, puis à leurs petits enfants.

Or, Robert et Marie avait eu :
-
Henry, dit d’Oisy (+ 1397), marié à Marie de Marle, fille d’Enguérand, seigneur de Marle et de Coucy
-
Philippe, marié à Iolande d’Enghien
-
Edouard, qui succéda à son père, les deux précédents étant pré-décédés
-
Louis, dit le cardinal de Bar, qui prit la toque ducale, pour la transmettre à René d’Anjou, fils de sa sœur
-
Charles, mort jeune
-
Jean, tué près de son frère Edouard, à la bataille d’Azincourt
-
Iolande, mariée au roi d’Angleterre, puis reine d’Aragon, et qui fut mère de Réné d’Anjou
-
Marie, femme de Guillaume, comte de Namur
-
Bonne, mariée à Waleram de Luxembourg, comte de Saint Pol et Ligny
-
Robert, mort sans enfants, en 1411.

Mais de son union avec Marie de Marle, Henri de Bar, dit d’Oisy, avait eu un fils : ce fut Robert (de Bar), comte de Marle et de Soissons, lequel, marié à Jacqueline de Bethune, fut le père de Jeanne (de Bar), dame de Marle, mariée, en 1433 à Louis de Luxembourg, comte de Saint Pol, union d’où provint le bienheureux Pierre de Luxembourg.

C’est cette Jeanne de Marle, dame de Jametz, en partie, qui, après la perte de son premier mari, décapité, pour raisons politiques, sous le sombre Louis XI, c’est, disons-nous, cette Jeanne de Marle qui, par son consentement à l’échange de ses droits, sur Cassel, en Flandres, contre ceux du Barrois, à Jametz, par le traité de 1437, rendit possible la transmission intégrale de cette seigneurie aux princes de Sedan.

Jametz sous les princes de Sedan (de 1440 à 1589)

1èredivision – Jametz Orthodoxe

Ide du Châtelet (1446)

Après la mort de Colart de Marley, 1446, sa veuve, Ide du Châtelet, fut d’abord inquiétée dans sa possession exclusive (au nom de sa fille et son gendre) de dame douairière de Dun et de Jametz. Le gouverneur bourguignon de Montmédy, G. de Hodenmacre, fit abattre ses insignes de haute justicière, et il revendiqua les prérogatives du prévôt de Saint Mard dans toute l’étendue de la seigneurie.

C’était légal, alors que le roi de Sicile n’avait pas encore exécuté les conditions du traité qu’il avait subi. Ce n’était plus qu’un acte arbitraire, en 1448, alors que la loi politique avait dégagé Jametz de la suprématie du Luxembourg. Le gouverneur de Montmédy fut donc débouté de ses intentions, et Robert de la Marck, époux de Jeanne de Marle, entra en possession, pleine et franche, de sa petite principauté.

Robert Ier de Lamarck (1449 – 1489)

Robert était fils aîné de Jean Ier d’Arenberg, seigneur de Sedan, Aigremont, Neufchâtel, Lumain et Braquemont, chambellan du roi Charles VII (érecteur du château de Sedan, 1454), et d’Agnès de Vernonbourg.

Comme héritier du nom et du titre des anciens Lamarck de Westphalie, Jean portait : d’or, à la fasce échiquetée, d’argent et de gueules, de trois tires, au-lion issant, de gueules.

Comme héritière du nom et des armes de Marley (Marle et Marlières), Jeanne, sa brû, portait : de gueules, au lion, d’argent, armé, lampassé et couronné, d’or. Neufchastial ancien.

Robert Ier mourut, en 1489, au siège d’Yvoi, dans les rangs de l’armée française.

Il eut de Jeanne de Marle :
- Robert II, qui viendra après Evrard, son cadet
- Evrard, sire de Jametz, qui devint cardinal archevêque de Valence
- Claude, qui fut épouse de Louis de Lenoncour, seigneur de Gondrecourt
- Bonne, mariée, à Jametz, à Pierre Baudoche, des Paraiges de Metz, seigneur de Moulins. Lors de ce mariage Jametz était, déjà, une belle place, forte et bonne, en tous points.

Evrard, alors prince évêque de Liège, se désista de ses droits en faveur de Catherine de Croy, sa belle-sœur, lors de son mariage avec Robert II, son frère, en 1491.

Robert II de Lamarck (1491 – 1536)

Ce prince, que Brantôme n’a pas eu honte de qualifier de gentil capitaine, succéda à Evrard. Il ne vint à Jametz que pour en faire un centre d’excursions, meurtrières, dans les terres de Lorraine, de Trêves, de Namur et de Luxembourg en 1493, 1494, 1495, 1496, 1497, terres qu’il inonda de sang et couvrit de ruines… menaçant Dun et Stenay… brûlant Mouzay… faisant une guerre acharnée à la maison d’Autriche… se constituant ennemi déclaré de tous les alliés de cette famille… jetant un insolent défi à l’empereur, en pleine diète de Worms…

Jametz lui devait ses premiers remparts, fortifications, déjà redoutables, derrière lesquels son fils, dit de Fleuranges, repoussa, en 1521, les attaques du comte de Nassau.

Il eut de la vertueuse Catherine de Croy, six garçons et deux filles :
- Robert – Guillaume – Jean – Antoine – Philippe – Jacques – Philippine et Jacqueline. Le dernier des fils fut chevalier de Malte, l’avant-dernier fut archidiacre de Liège. Antoine fut abbé de Beaulieu, en Argonne. Restent le cadet et son puîné, qui suivront.

Guillaume de Jametz, mort sans enfants, en 1529, n’est indiqué que pour mémoire…

Jean de Lamarck (1536 – 1560)

Jean de Lamarck, dit du Saulcis, fut le plus remarquable des sires de notre première division. Il habita Jametz, presqu’à demeure fixe. Il constitua, avec sagesse, son petit état. Il l’administra avec prudence et bonté. Il lui donna des lois, une municipalité régulière, un corps de magistrature, etc.

François de Landreville, son écuyer et capitaine des gardes, eut le commandement militaire. Claude Marolles fut son bailli, ayant pour lieutenant Thierion Aubry, puis Thierion Richer. Jean des Prés, ensuite Claude des Chaumes, de Chaumont en Porcien, furent, successivement, ses procureurs généraux. Gérard de Bussy et Jean Juppin étaient receveurs de ses finances. Toussaint Aubry et Georges Bar occupèrent les deux premiers postes de la mairie.

En 1557, le bourg était complètement édifié et enceint de murailles. La ville renfermait 188 chefs de famille, non compris la noblesse, le clergé, la magistrature, les finances, les officiers civils et militaires, et la garnison du château.

Jean de Lamarck reçut chez lui, le 27 septembre 1543, la visite du roi François Ier, auquel il ne cessa d’être dévoué, sans réserves. Il accompagna Henry II dans cette promenade militaire, qui procura à la France la cession des trois évêchés. Il avait payé de sa personne, en 1542, à la prise de Damvillers. Il mourut en 1560, ne laissant, de son mariage avec Hélène de Bissipat, qu’une fille, prénommée Philippe, laquelle devint femme de Louis de Dompmartin, baron de Fontenois.

2èmeDivision – Jametz calviniste

Henri Robert de Lamarck (1560 – 1574)

Ce fut Henry Robert de Lamarck, duc de Bouillon, prince de Sedan, qui introduisit le protestantisme à Jametz.

Il était né, en 1539, de Robert IV, petit-fils de Robert de Fleuranges, et petit-neveu de Jean de Lamarck, lequel l’avait institué héritier, pour sa terre de Jametz.

Il avait épousé, en 1558, Françoise de Bourbon, fille de Louis, duc de Montpensier. Celle princesse remontait au trisaïeul d’Henry IV, devenu roi de Navarre en 1562.

Henry Robert fit de Sedan et de Jametz, des asiles sûrs pour les nombreux réformés, qui fuyaient les persécutions de la Ligue. Il procéda, ensuite, à la réformation des coutumes de ses Etats, notamment de celles de Sedan, de Raucourt et de Jametz.

A cette rédaction, concoururent Gilles du Han, bailli de Sedan, Claude de Marolles, bailli de Jametz, et autres jurisconsultes, pris de tous les pays de son obédience : y coopérèrent, aussi, Jean de Shélandre, comme élu de la noblesse, Thierion Aubry, Toussaint Aubry, Thomas Regnault, et Geoffroy Robert, comme élus de la bourgeoisie de Jametz.

Le duc établit ensuite une cour dite des hauts jours. Elle siégeait, alternativement, à Sedan et à Jametz. La population de 1557 était doublée en 1569.

On créa la rue Neuve sur l’emplacement du jardin du gouverneur, et la ville se trouva ainsi divisée : rue de la Porte du Brüe – du Temple – de la Halle – du Jardin Shelandre – du Four banal – du grand Château – de Sainte Marie du Mont – de Saint Anthoine – de la Porte de Remoiville – de Revongne – de la Rivière – de la Garenne – des Tanneries – du Moulin – des Pressoirs – enfin, rue Neuve… le tout entourant la place du château.

Les fortifications furent hérissées de défenses, et le vieux capitaine de reîtres Jehan Martin, dit Thin de Shelnders, inféodataire du fief de Sommazannes et de Goivaux, fut, à la mort de Landreville, installé à la tête de la garnison.

Henry Robert mourut, à Sedan, le 2 décembre 1574 : les protestants prétendirent que Catherine de Médicis l’avait fait empoisonner. Il laissait deux fils et une fille : Guillaume Robert, Jean et Charlotte. Ce fut l’aîné qui lui succéda.

Guillaume Robert de Lamarck (1574 – 1588)

Le règne de Guillaume Robert correspond au plus mauvais temps des fureurs de la Ligue, fureurs dépassées, bien souvent, par les représailles fanatiques des protestants.

Shelandre avait pris l’initiative du ravage sur les terres de l’évêché de Verdun, terres soumises à l’engagère des anciens temps.

Avec la compagnie des gens de pied du capitaine Herric, il investissait Mangiennes. Il appréhendait au corps les magistrats épiscopaux, et il appelait leurs justiciables aux plaids de Jametz. Il prélevait les redevances seigneuriales, contraignait les communautés à founir des travailleurs. Il faisait dévaster les forêts, pour ajouter aux fortifications.

Cette conduite était approuvée par le duc de Bouillon. Elle amena, en 1586, l’invasion de Sedan, Douzy, Raucourt, par Henry de Guise, dit le balafré. Puis, enfin, en février l686, les ban et arrière-ban de la noblesse lorraine furent convoqués, pour le renversement de Jametz, devenu le repaire du brigandage et le boulevard avancé de l’hérésie.

Pendant que les troupes assiégeantes s’assemblent, Shelandre poursuit une guerre de surprises et de razzias incessantes, sur les terres de Verdun. C’est alors que, sous ses coups, secondés par le capitaine prévôt de Sancy, tombèrent, l’un après l’autre, les châteaux-forts de Bréheville, de Ville, de Pilon, de Mangiennes, le fort de Brabant sur Meuse, etc.

Mais l’investissement de Jametz mit fin à cette guerre d’avant-postes, et le 13 avril 1589, la place fut enfin attaquée. Guillaume Robert et son frère ne virent pas la fin de ce siège. Jean tomba, aux côtés de son aîné, dans une déroute des bandes appelées d’outre Rhin, au secours du protestantisme, et Guillaume Robert, réfugié à Genève, y mourut, le 1er janvier 1588, à l’âge de 26 ans, après avoir institué Charlotte de la Marck sa légataire universelle, à la condition seule de maintenir dans ses Etats l’exercice du culte réformé. Il lui substituait le duc de Montpensier, François de Bourbon son oncle, pour le cas où elle décéderait sans enfants.

Charlotte de la Mark

A la mort de Guillaume Robert, la souveraineté, qu’il laissait à sa sœur, déjà était envahie par les troupes lorraines, et M. d’Haussonville, baron d’Ornes, avait porté son quartier général à Jametz.

Les assaillants se trouvèrent, alors, en face d’un corps de place quadrangulaire, ainsi distribué :
-
Un donjon précédé d’une vaste cour en rectangle
- les logements du gouverneur sur un des côtés
- un bastion dit de la Cloche, à l’ouest
- un boulevard, dit du Brut, au nord
- un bastion, dit de la Grille, à l’est
- un boulevard, dit du Robin, avec son éperon, au sud
- un boulevard, dit de la Porte, au sud ouest
- une porte, dite du Bourg
- une seconde porte, précédée d’un pont-levis et d’un pont.

Le tout était entouré de fossés pleins d’eau, fossés alimentés par la rivière du Loison.

A suivre : Jametz, terre conquise, sous la domination lorraine

 

clomiphenefr |
allopurinolfr |
Parler l'anglais en Martinique |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | La Boite qui Mijote
| NON A LA MONARCHIE AU SENEG...
| Alain Daumer