Les tabatières en carton verni de Sarreguemines (57)

Blason de SarregueminesTabatière en carton

Il était une fois …

Evidemment, il n’y a plus de fabriques de tabatières en Lorraine. Mais il y a quelques cent cinquante ans …

D’après un article paru dans « Le magasin pittoresque » – Année 1852

La tabatière de carton verni est en France, comme en Hanovre, en Bavière et en Oldenbourg, l’objet d’une fabrication très active.

Sarreguemines (Moselle) est le centre de cette industrie, qui fut introduite à Sarralbe en 1775, par un meunier de Nassau, et qui s’est étendue, principalement pendant ces dernières quarante années, dans les communes de Sarreguemines, Bliesbrucken , Gros-Bliederstroff , Neufgrange, Sarralbe, Velfordeng, Hornbach, Bliesgueswiller et Blieshoveigen. La première fabrique en ce genre fut établie à Sarreguemines en 1809.

En jetant les yeux sur ces petites tabatières vernies, dont le prix moyen est de 10 à 20 centimes la pièce, on est tenté de supposer, que cette fabrication et ce commerce, vu la valeur minime et la consommation naturellement très restreinte de l’objet, sont limités à un chiffre d’affaires si modique, qu’il leur ôte tout intérêt.

Il n’en est rien : l’industrie de la tabatière de carton est une de ces mille petites industries inconnues qui alimentent en tout temps notre exportation. Et, autant qu’aucune autre, elle est précieuse pour le pays, car elle est exercée dans les campagnes de la Moselle, dans le sein de familles pauvres, et en alternance avec les travaux agricoles.

On n’estime pas à moins de deux millions de tabatières, la production de l’arrondissement de Sarreguemines. Le tiers environ est exporté.

Il est impossible, du reste, de contester à la France une véritable supériorité dans cette fabrication, comme dans toutes celles où il faut de l’originalité et du goût. Brunswick, Obestein, Ensheim, Stuttgard, Offenbach, Nuremberg, étaient depuis longtemps renommés pour ce genre d’industrie. La patience et le soin des artisans allemands, leur aptitude pour le travail du cartonnage, l’habileté de pinceau des peintres de Brunswick, le bas prix de la main-d’œuvre, par suite le bon marché des produits, une clientèle assurée eu divers marchés, enfin la mode même, tout paraissait se réunir pour maintenir à l’Allemagne la production exclusive de la tabatière de carton.

Malgré tant d’avantages, les paysans de la Moselle, bien dirigés, sont arrivés à faire mieux et à aussi bas prix, et la meilleure preuve de leur succès se trouve dans l’exportation facile et avantageuse de leurs tabatières.

Les tabatières de carton de Sarreguemines attestent l’intelligence, l’habileté et le goût des fabricants. Elles sont remarquables par la correction du travail, la précision de l’ajustement des charnières en cuivre ou en carton, la délicatesse et l’élégance des incrustations en nacre, en étain ou en argenton, la netteté du vernis. Quant au bon marché, il est extraordinaire.

Alors, à quand un musée de la tabatière à Sarreguemines ?


Archive pour 30 janvier, 2011

Lunéville de 1709 à 1760

Blason de Lunéville 

Continuons notre petite promenade en parcourant les événements qui ont marqué la belle ville de Lunéville.

D’après la monographie « Essais historique sur la ville de Lunéville » de Guerrier – 1817

Année 1709 : Léopold eut le malheur de voir ses sujets victimes de l’hiver mémorable de 1709. Le 6 janvier, il commença à geler extraordinairement fort. La veille, il avait plu tout le jour, et la pluie continua jusqu’à minuit. Alors le vent du Nord s’étant élevé, il gela d’une telle force, que, le 8, les rivières étaient entièrement glacées.

Ce grand froid dura 10 à 12 jours, et augmenta tellement, qu’il n’était pas possible de le soutenir, et qu’on fut forcé d’abréger l’office divin. Ce grand froid causa des maladies de poitrine, dont beaucoup de personnes moururent à Lunéville. Le grand froid cessa le 25 janvier, il dégela pendant 7 à 8 jours. Ensuite, il recommença à geler comme auparavant, et la gelée fut si forte, que les vignes, les arbres, et même les bleds en herbe furent gelés. Cette seconde gelée finit le 10 Février.

Pour comble de malheur, la récolte de 1708 ayant été mauvaise, il n’y avait plus de magasins ni de ressources contre la disette. Léopold avait, dès le mois de novembre 1708, rendu des ordonnances pour assurer la subsistance de ses sujets. Il avait fait arrher, par ses commissaires, chez les négociants et les rentiers, quantité de froment, dont il avait payé, de ses deniers, le 10ème du prix. On leur permettait ensuite de vendre aux-mêmes ces bleds au peuple par petites parties, au prix fixé, et l’on retirait les arrhes.

La défense d’exporter ne regardait d’abord que le froment. Léopold fut obligé de l’étendre sur le méteil, le seigle, l’orge et l’avoine, avec défense d’en débiter autrement qu’en détail et à ses sujets. Le 23 avril, l’avoine fut taxée à 12 francs le resal de Nancy, et il fut défendu, sous peine de la vie, d’exporter des grains. On faisait du pain mélangé d’un tiers de froment et de deux tiers d’avoine. Il n’était permis qu’à quelques boulangers de faire du pain blanc pour les malades seulement, et pour les personnes de distinction. Le nombre des bangards fut augmenté, pour empêcher de couper les épis avant leur maturité.

Il fut défendu de nourrir des pigeons domestiques. On accorda des privilèges à ceux qui prêteraient ou vendraient des grains pour les semailles. Les bleds de mars, comme orge, avoine promettaient une récolte abondante mais peu de froment avait échappé à la gelée. Ce peu fut destiné aux semailles, et remplacé par du froment des récoltes précédentes, que Léopold fit venir d’Allemagne. Chaque lieu fut obligé de se charger de ses pauvres et de les empêcher d’aller ailleurs.

Année 1710 : On a démoli, cette année, les remparts, depuis les Capucins jusqu’à la porte Joly. Dès que les maux causés par l’hiver de 1709 furent un peu réparés, on se livra à la joie, et l’on vit renaître les plaisirs à la cour de Lunéville. La Duchesse et ses enfants figuraient dans les ballets. Adrienne-le-Couvreur, qui devint dans la suite si célèbre, jouait la comédie à Lunéville dès l’âge de 18 ans. Léopold a fait construire derrière son château, pendant les années 1711 et 1712, de magnifiques jardins, appelés les Bosquets, sur les dessins de Gervais, le « Le Nôtre de la Lorraine ». Ces jardins étaient ornés de statues de la main de Nicolas Renard.

Année 1712 : Léopold transféra les Sœurs-Grises à l’entrée du faubourg de Viller. Il y posa la première pierre de leur église le 23 juin. Elle était sous l’invocation de St Antoine de Padoue, elle a été convertie en usine à plâtre. Léopold reçut, cette année, à sa Cour, le Roi et la Reine d’Angleterre, le Duc de Bavière, le Prince Emmanuel de Portugal, le Prince et la Princesse de Modène, Jacques III, sous le nom de Chevalier de St George. On a commencé cette année la construction des grands-moulins là où ils sont actuellement, ils étaient auparavant près du premier pont à droite en allant au faubourg.

Année 1714 : Stanislas, Roi de Pologne, avait vu en 1700, avant son élection, la Cour de Lorraine à Nancy. Il la revit, au mois de juillet de cette année, à Lunéville, où il passait sous le nom de Comte de Cronstein, pour se rendre à Deux-Ponts. Il fut, peu après, obligé de faire vendre secrètement des bijoux de grand prix à Lunéville. Le Marquis de Beauvau, depuis Prince de Craon, ayant su à qui ils appartenaient, le dit au Duc Léopold, qui les renvoya avec leur valeur en argent. Stanislas se plaisait à rappeler cette circonstance de sa vie, comme un motif de reconnaissance envers la Maison de Lorraine, et de son attachement pour celle de Beauvau.

Année 1715 : La Reine-Mère d’Angleterre vint visiter la Cour de Lunéville cette année, et son fils le Prétendant y vint l’année suivante.

Année 1716 : Le 10 juin, veille de la fête du St Sacrement, la chapelle de la Cour a été bénite par l’Abbé Huguin. Le Duc Léopold faisait fleurir dans ses États le commerce, l’agriculture et les arts. Il mérita, par ses bienfaits, le glorieux surnom de père de son peuple, et de restaurateur de sa noblesse et de sa patrie. Il trouva la Lorraine désolée et déserte, il la repeupla et l’enrichit. Il eut la prudence d’être toujours bien avec la France et l’Empire. Il procura à ses peuples l’abondance qu’ils ne connaissaient plus. Sa noblesse, réduite à la dernière misère, fut mise dans l’opulence par ses seuls bienfaits. Il faisait rebâtir à ses dépens les maisons des gentilshommes, payait leurs dettes, mariait leurs filles.

Les arts, dans sa petite province, produisaient une nouvelle circulation, qui fait la richesse des États. Sa Cour était formée sur celle de France. On ne croyait pas avoir changé de lieu, quand on passait de Versailles à Lunéville.

A l’exemple de Louis XIV, il faisait fleurir les belles-lettres. Il établit à Lunéville une espèce d’université, où la jeune noblesse d’Allemagne venait se former. On y apprenait les sciences dans des écoles où la physique était démontrée aux yeux par des machines admirables. Il cherchait les talents jusque dans les boutiques et les forêts, pour les mettre au jour et les encourager.

Enfin, pendant tout son règne, il ne s’est occupé que du soin de procurer à son peuple la tranquillité, les richesses et des plaisirs.

Année 1719 : Le mardi 3 Janvier, à 5 heures du matin, le feu prit à la partie du Château qui regarde la ville. La chapelle, les nouveaux bâtiments, l’ancien château, la voûte et le clocher furent réduits en cendres, et la cloche fondue. Plusieurs personnes périrent dans les flammes. On ne put rien sauver des richesses que renfermait cette partie du château, la perte fut de plusieurs millions. Léopold eut de grandes inquiétudes sur les papiers secrets de sa cassette. Il ne fut tranquille que lorsqu’on lui eut rapporté la serrure et les clefs, ce qui prouvait que tout le reste avait été la proie des flammes. On reconstruisit plus magnifiquement ce que le feu avait consumé.

Année 1721 : Cette année et les deux suivantes, la grande rue du faubourg de Viller a été bâtie.

Année 1722 : C’est depuis le dimanche 26 Avril de cette année qu’on chante deux grand’messes à la Paroisse , M. Sigisbert Verlet en ayant obtenu la permission de M. de Chamilly, évêque de Toul.

Année 1724 : La Confrairie des Agonisants a été établie cette année par M. Verlet, curé, qui établit aussi celle de l’adoration perpétuelle du St Sacrement. La ville commença la Maison de Charité dans une vieille maison qui appartenait à la Commanderie de St George, et qui fut payée par Léopold. Cet établissement se soutint par le zèle de la Demoiselle Gontier, et François III l’autorisa par lettres-patentes du 23 mars 1736.

Stanislas y fonda deux Sœurs de St Lazarre, par contrat du 15 Juillet 1746, on y mit une 3e Sœur en 1748, au moyen d’une rente, qui fait partie des rentes créées par le Roi de Pologne en faveur des pauvres de tous les lieux où il avait des résidences. Il confirma de nouveau ces fondations par lettres du 7 Février 1752. Il fit reconstruire à neuf et agrandir la maison sur une partie de l’emplacement de l’ancienne paroisse St Jacques. Par contrat du 6 Novembre 1756, et lettres-patentes du 17 Janvier 1757, ce Prince fonda une autre Sœur.

Année 1728 : On commença la Place Neuve et les rues qui y aboutissent. L’ordonnance du 10 juillet accorde des privilèges pendant plusieurs années à ceux qui y bâtiront.

Année 1729 : Cette année est remarquable par la mort de Léopold, législateur et bienfaiteur de son pays, qui le perdit le 27 mars. Un mot sublime fait son éloge « Je quitterais demain ma souveraineté, disait-il, si je ne pouvais faire du bien ». Aussi a-t-on vu, longtemps après sa mort, ses sujets verser des larmes en prononçant son nom. On a commencé cette année à démolir l’ancienne paroisse.

Année 1731 : La cérémonie de la béatification du Bienheureux Pierre Fourier, de Mattincourt, s’est faite dans l’église des Religieuses de la Congrégation, les 21, 23 et 24 Janvier, et à la Paroisse, au mois de juin suivant.

Année 1736 : La guerre entre la France et l’Empire étant terminée, et les préliminaires de la paix signés à Vienne, Stanislas fut reconnu Roi de Pologne, et Grand-Duc de Lithuanie, et il en conservait les titres et honneurs, avec restitution de ses biens et de ceux de la Reine son épouse.

L’Empereur consentait qu’il fût mis en possession du duché de Bar. Il était stipulé en outre que le Duc de Lorraine renoncerait à ses États en faveur de Stanislas, Roi de Pologne, qui en jouirait pendant sa vie, et qu’à sa mort, les duchés de Lorraine et de Bar seraient réunis à la France. Le Duc de Lorraine, François III, ne put se résoudre qu’avec le plus grand regret à abandonner ses sujets, dont il était adoré.

François III, ayant épousé à Vienne le 12 Février, l’Archiduchesse Marie-Thérèse, depuis Impératrice et mère de Joseph II, la Cour et les habitants de Lunéville s’empressèrent de célébrer cet événement par une fête qui répondît aux sentiments d’affection qui les animaient.

En conséquence, ils firent construire, entre les deux ailes du Château, un Temple de l’Hymen, de 80 pieds de haut, de figure octogone , avec quatre portiques ornés de pilastres et de colonnes d’ordre corynthien, qui soutenaient des trophées d’armes sculptés en relief. Il était fermé par une coupole terminée par un aigle. Aux deux faces principales étaient les armes de Lorraine et d’Autriche, peintes avec beaucoup de goût. On y entrait par quatre perrons.

Aux quatre coins de la place, il y avait quatre pyramides sur chacune desquelles étaient les médailles des Empereurs d’Autriche et des Ducs de Lorraine. Un aigle sculpté en relief terminait chacune de ces pyramides. Ce temple avait été dessiné par Jadot, architecte de François, et orné de peintures par Girardet.

Il y eut illumination, feu d’artifice, et quatre tables chacune de cent couverts. Pour garnir ces tables, on avait chassé dans toute la Lorraine et amené à Lunéville plus de 200 voitures de gibier, sans compter les volailles et les autres viandes. Les cuisiniers ordinaires de la Cour, les rôtisseurs, les pâtissiers, confiseurs, etc. furent augmentés de 400 qui travaillèrent pendant huit jours.

Année 1737 : Dès que la nouvelle de la renonciation du Duc François se fut répandue, on vit arriver des commissaires chargés, de sa part, de délier ses sujets de leur serment de fidélité.

Il en vint également de la part des Rois de Pologne et de France, pour recevoir le serment de fidélité de leurs nouveaux sujets :
- au Roi de Pologne, comme souverain actuel
- au Roi de France, comme souverain éventuel, après la mort de Stanislas, la Lorraine devant être alors réunie à la France, pour en faire une province. La consternation fut extrême, non seulement à Nancy et à Lunéville, mais aussi dans toute la Lorraine.

Le Duc François III ayant cédé la Lorraine pour la Toscane, et les vignes ayant été gelées le 16 mai, jour de la St Honoré, les plaisants dirent que S. A. R. avait vendu la Lorraine, et que St Honoré en avait bu les vins.

La Duchesse douairière de Lorraine et la Princesse Charlotte, sa fille cadette, quittèrent la Cour de Lunéville, pour se rendre à Commercy, dont la principauté avait été assignée à Madame la Régente, pour en jouir en toute souveraineté pendant sa vie. Elle fut reçue dans cette ville avec des démonstrations de joie extraordinaires, égales à la douleur extrême avec laquelle les peuples l’avaient vue quitter sa Cour de Lunéville.

Il est impossible de peindre la tristesse, la désolation des habitants de cette ville, chez qui le sentiment d’amour pour ses maîtres était porté jusqu’à l’adoration. Ces témoignages d’attachement, en ce cruel moment, firent jouir la Duchesse du triomphe le plus flatteur que les bons Princes puissent ambitionner, et du spectacle le plus touchant pour les Souverains qui savent se faire aimer.

Ce peuple accourut de toutes les parties de la Lorraine, se jetant aux genoux des Princesses, se prosternant autour de leur voiture, et s’élançant à corps perdu sous les roues et sous les pieds des chevaux. Arrêtées mille fois dans leur marche, les Princesses versaient des torrents de larmes parmi les cris et les sanglots de ce peuple, qui ignorait encore combien Stanislas, son nouveau maître, s’efforcerait, par ses bienfaits, d’essuyer ses larmes et de mériter son affection. Elles eurent toutes les peines du monde d’arriver à leur nouveau séjour.

Aussitôt après le départ des Princesses, les commissaires du Roi de Pologne arrivèrent, et prirent possession de la Lorraine dans l’ancien palais de Nancy, où étaient réunies toutes les autorités. On avait fait la même cérémonie dans le duché de Bar.

Le régiment des Gardes fut licencié, on laissa aux soldats leurs épées et leurs chevaux. Quelques officiers et la plupart des Gardes furent incorporés dans le nouveau régiment qui fut formé. Les Cent-Suisses et les Chevaux-Légers de la Garde du Duc prirent la route de Flandre, où François avait résolu de tenir sa Cour jusqu’au décès du Grand-Duc de Toscane. Une partie de l’ancienne Cour resta en Lorraine.

Quelques seigneurs, qui furent choisis, se rendirent en Flandre. Le rendez-vous pour le départ fut fixé à Nancy. On y conduisit la plus grande partie des meubles et des effets du château de Lunéville. Le Duc fit présent à Stanislas, de l’orangerie, des trumeaux et des glaces. La bibliothèque de Nancy, où Léopold avait réuni tout ce qui concerne la jurisprudence, fut accordée au Corps des Avocats.

Quant à celle de Lunéville, elle fut emballée avec une suite précieuse de médailles d’or, d’argent et de bronze - un cabinet de physique, formé pour l’académie de cette ville, des tableaux des plus grands maîtres, dont plusieurs de Rubens, et une chapelle enrichie de six chandeliers d’or, et de reliquaires ornés de pierreries.

On y joignit les archives de la Maison de Lorraine, et les plus belles tentures de tapisseries des palais de nos Ducs. Elles représentaient l’histoire de la création du monde - la guerre de Troye , dont quelques pans avaient été brûlés dans l’incendie du Château , en 1719 – l’histoire d’Alexandre - divers traits de la fable, ouvrages sortis de la manufacture des Gobelins, et dont Louis XV avait fait présent au Duc - les douze mois de l’année, et 25 pièces représentant les conquêtes du Duc Charles V, aïeul du Duc François - les deux dernières étaient doubles, et avaient été faites à Nancy, par des ouvriers des Gobelins, dont Léopold avait établi une manufacture près de son palais.

On y joignit plusieurs tentures de damas, un nombre considérable de portières, travaillées en or, et en soie -l’orangerie de la Malgrange, et les superbes décorations de la salle d’opéra. La vénerie, les médailles et le cabinet de physique passèrent à Vienne. Les comédiens et les musiciens furent envoyés à la cour de Commercy. L’orangerie et plusieurs meubles restèrent à Bruxelles.

La prise de possession du Barrois se fit à Bar, le 8 février, et celle de la Lorraine, le 21 Mars, à Nancy. Le célèbre Duvivier grava la médaille du Roi de Pologne, à l’occasion de son avènement.

Stanislas, Roi de Pologne, Grand-Duc de Lithuanie, Duc de Lorraine et de Bar, surnommé le Bienfaisant, étant informé que la prise de possession était consommée, fit ses dispositions pour se rendre dans ses nouveaux États.

Après ses adieux au Roi, à la Reine sa fille, et à la famille royale, il partit de Meudon le 1er avril, et arriva le 3 à Lunéville. La Reine de Pologne l’y joignit le 13. Leurs Majestés occupèrent d’abord l’hôtel de Craon, parce qu’on travaillait aux réparations du Château.

Stanislas s’occupa aussitôt à embellir les Bosquets qui accompagnent le Château.

Il fit construire :
- le magnifique Sallon de Chanteheux, qui terminait la vue du côté de Blâmont
- une cascade, à l’extrémité de l’allée dite des soupirs, et vis-à-vis le Canal. Au-dessus de cette cascade était un sallon
- Il fit dessécher un marais entre la Vezouze et le Canal, qu’on avait converti en promenades et en beaux jardins, dont chacun avait son pavillon
- un Kiosque, qui fut brûlé pendant un feu d’artifice
- une Chinoise
- Enfin un Rocher, de l’invention de François Richard, ancien horloger du Duc Léopold.

On voyait, sur ce Rocher, qui était appuyé contre le mur de la Terrasse, 80 figures mouvantes, de grandeur naturelle, qui, par le moyen des eaux, faisaient toutes sortes de mouvements. On y entendait des voix humaines, les cris de plusieurs animaux et le son de plusieurs instruments.

Au bas du rocher, était sur le Canal, un pont appelé le Pont Tournant, et sur la Vezouze, le Pont-Vert ; ces deux ponts conduisaient, en ligne droite, à la Belle-Croix.

Le même artiste, qui avait inventé le Rocher, fit le bateau de Lunéville, dans lequel deux hommes faisaient mouvoir douze rames avec une vitesse incroyable. Le célèbre Wayringe fit, pour le Roi de Pologne, un bateau propre à remonter les rivières. Stanislas en fit lui-même l’épreuve sur la Vezouze, depuis l’hermitage de Ste Anne jusqu’à la digue du grand Canal. Il remonta cette rivière sans chevaux, sans perche et sans aviron.

Les Bénédictins, établis à Léomont, ayant acheté du Prince de Craon, la maison et le jardin de Ménil, s’y établirent en 1737, avec l’agrément du Roi de Pologne, qu’ils obtinrent le 26 août de la même année.

Année 1738 : L’Hôtel des Pages et celui des Cadets-Gentilshommes furent construits entre les Deux-Ponts. Ces derniers formaient une compagnie, composée d’un commandant, de deux capitaines-lieutenants, d’un major, de 4 brigadiers et de 48 cadets, dont 24 Polonais et 24 Lorrains. Ils faisaient, pendant trois ans, le service militaire, avaient des maîtres de langues, de mathématiques, d’histoire et de géographie. Le Roi de Pologne leur donna, cette année, un règlement.

Année 1740 : Pour rendre l’établissement de la taille perpétuel dans l’Hôpital de Lunéville, Stanislas se servit du Baron de Meszek, Maréchal de sa Cour, qui acheta le 17 février, du Comte du Hautoy, la terre de Chanteheux, dont il faisait don à l’Hôpital St Jacques de Lunéville, après sa mort, celle du Duc Ossolinsky, de son épouse, et celle du Roi. Il a été disposé autrement de cette terre, mais le Roi de Pologne en assura la valeur à l’Hôpital, qui a un fonds suffisant pour y continuer l’opération de la taille à perpétuité, du 20 avril au 10 mai, et du 20 août au 10 septembre.

Année 1741 : La Lorraine souffrait beaucoup de l’extrême cherté du blé. La disette était si grande dans le duché de Bar, qu’on venait jusqu’à Lunéville acheter des sons pour en faire du pain. Le peuple de chaque ville voulut empêcher la sortie des grains pour les autres villes. Il y eut une émeute violente à Lunéville le 23 mai, pendant que le Roi de Pologne était à la Malgrange. A son retour, il fit rendre la liberté aux femmes qui étaient dans les prisons.

Année 1744 : Un incendie, commencé le 14 janvier, à sept heures et demie du soir, consuma l’aile du Château du côté du Canal. Elle était habitée par le Chancelier, le Comte de Bercheni, Grand-Écuyer, et d’autres personnes de la Cour. Personne n’y périt.

Le 8 Septembre, la Duchesse de Chartres et la Princesse de Conti sa mère, arrivèrent à Lunéville avec le Roi de Pologne. Le Duc de Chartres les y joignit le lendemain. Le Dauphin arriva le 21 septembre, à sept heures et demie du soir. Le 22, il jeta de l’argent au peuple. L’après-dîner, Madame et Mademoiselle Adélaïde arrivèrent, et furent reçues par deux cents jeunes filles habillées de blanc avec des écharpes bleues. La Reine de France arriva le 28, le Roi, le 29 à huit heures du soir. Tout était illuminé. Stanislas imagina toutes sortes de plaisirs pour rendre agréable au Roi son séjour à Lunéville.

Le 2 octobre, le Roi de France fit la revue des Gendarmes de sa Garde dans la plaine du Champ-de-Mars, et après avoir dîné au Château de Chanteheux, il partit pour Strasbourg. La Reine partit de Lunéville le 7. Mademoiselle de Charolais arriva le 18 octobre. Elle repartit le 28, après avoir vu célébrer l’anniversaire de la naissance de Stanislas.

Année 1745 : Le Prince de Conti passa à Lunéville le 16 avril, il allait prendre le commandement de l’armée du Rhin.

Année 1746 : Helvétius, fermier-général, s’arrêta quelques jours à Lunéville. Le mercredi 6 Juillet, un orage furieux, mêlé de grêle, ravagea une partie de la Lorraine, depuis Lunéville jusque vers l’Alsace. Le vent déracina des arbres, renversa des maisons, et détruisit toutes les récoltes. Les foins qui étaient coupés, furent emmenés par les eaux, les autres gâtés. Le dommage fut de plus d’un million et demi. On tira des magazins du Roi dix mille sacs de froment, qui furent prêtés aux Communes pour ensemencer les terres.

Année 1747 : Catherine Opalinska, Reine de Pologne, mourut à Lunéville, le 19 mars, à cinq heures et demie du soir, âgée de 66 ans. Cette Princesse épousa, à 16 ans, Stanislas Leczinski, qui n’en avait que 19. Elle avait beaucoup de dignité, était généreuse et charitable. La première élection de Stanislas, du 12 juillet 1704, avait été confirmée par son sacre et celui de Catherine, le 1er juillet 1705. Elle était à St Cyr pendant l’absence de son époux, lors de sa seconde élection. Son corps fut exposé le 20 Mars, et conduit à Bonsecours, où l’Abbé Clément prononça l’oraison funèbre. Stanislas fit ériger, dans la chapelle de l’église de Bonsecours, un mausolée à la Reine son épouse, par Adam le cadet.

Montesquieu, qui était venu en Lorraine, trouva à la Cour de Lunéville, des Sociétés dignes de lui, il travaillait alors à l’Esprit des lois. Il écrivait de Paris, le 17 juillet : « J’ai été comblé de bontés et d’honneurs à la Cour de Lunéville, et j’ai passé des moments délicieux avec le Roi de Pologne ».

Année 1749 : Gabrielle-Émilie de Breteuil, épouse du Marquis du Châtelet-Lomont, et amie de Voltaire, mourut le 10 septembre, à une heure du matin. Le 4, elle avait accouché d’une fille, après avoir mis la dernière main à son « Commentaire sur Newton ». Elle fut inhumée dans la nouvelle église. Voltaire partit le 13 de Lunéville.

Année 1751 : Le convoi funèbre du Maréchal de Saxe, mort à Chambort le 30 novembre précédent, passa le 1er février à Lunéville. Il allait à Strasbourg, où l’on avait érigé à ce grand homme un superbe mausolée dans le temple protestant de St Thomas.

Année 1752 : Girardet, Joly et d’autres peintres et sculpteurs employés par Stanislas, commencèrent sous ses yeux, au Château, le 15 novembre, des exercices de dessin, de peinture et de sculpture sur le modèle, pour former des élèves.

Année 1753 : Maupertuis a fait, cette année, quelque séjour à la Cour du Roi de Pologne.

Année 1755 : Le 6 février, le feu prit, à trois heures du matin, vers le milieu de l’aile du Château donnant sur le Canal. La flamme, rendue plus ardente par le froid excessif, dévora tout en trois heures de temps. On coupa ce qui liait cette aile au Château, pour empêcher la communication. Le comte de Lucé, averti par la fumée, se sauva demi-nu. Son valet-de-chambre sauta par la croisée, sur le canal glacé. Le Marquis de Menessaire sortit aussi en chemise par une croisée, au moyen d’une échelle. Une dame incommodée, dans son lit, fut emportée par un soldat des Gardes-Lorraines. Le Chancelier eut le temps de sauver ses papiers, et M. de Bercheny, celui de déloger. Personne ne périt.

Le 15 juin, à sept heures du soir, fut fondue et coulée, dans l’espace de trois minutes, par Barthelémy Guibal, la statue de Louis XV. Le 15 novembre suivant, on la chargea à l’endroit où elle avait été coulée, et on la conduisit le soir devant le Château. Le 16, à huit heures et demie du matin, elle partit de Lunéville sur un chariot fait exprès, et trainé par 32 chevaux, elle arriva à huit heures du soir à la porte St George, à Nancy. Le 17, elle entra dans la ville, et le 18, elle fut posée sur son piédestal.

Année 1757 : Le Maréchal de Richelieu passa le 20 juillet à Lunéville.

Année 1758 : Le 5 février, le Comte de Clermont, Prince du Sang, passa pour aller prendre le commandement de l’armée du Rhin. Le prince Xavier de Saxe était à la Cour du Roi de Pologne les 11 et 12 Juin. Stanislas lui fit rendre tous les honneurs dus à son rang, et lui donna de belles fêtes. Il était sans fiel, et caressait les enfants de son second compétiteur, comme il avait aimé le Maréchal de Saxe, fils du premier.

Année 1759 : Le Prince de Condé, venant de l’armée du Maréchal de Broglie, s’arrêta le 23 novembre à la Cour de Lunéville.

 

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